TÉMOIGNAGES DES TITULAIRES VOULANT RENTRER AU PAYS

A l’instar des stagiaires et néo-titulaires , les titulaires déjà en exil depuis de nombreuses années vivent également une souffrance criante . Nous avons accepté de partir, sous prétexte que :

1. Il n’existe pas de besoins : pourtant nous sommes révoltés d’entendre que des classes restent parfois sans professeurs plusieurs mois avant que le Rectorat n’envoie des remplaçants qu’il maintient dans la précarité.

2.Le concours est national . La Martinique n’est-elle donc pas un département faisant partie de la France ? N’est-elle pas une académie de choix au même titre que les autres académies ? Pourquoi les originaires d’outre-mer ne peuvent pas rentrer chez eux au bout de quelques années de services tout comme c’est possible pour les titulaires de l’hexagone qui souhaitent rentrer dans leur région d’origine ?

Combien de temps allons-nous être la main d’œuvre sacrifiée pour le bénéfice des académies de la métropole ?
Car oui il s’agit bien d’un sacrifice, compte tenu de la rupture géographique, familiale et culturelle. Dans la plupart des cas, même après 4 , 8 ou 10 ans de services dans l’hexagone nos demandes de mutation et de recours sont systématiquement refusées.

Les titulaires mutés de force sont en souffrance. La souffrance dont je vous parle est celle de personnes qui font le sacrifice de ne pouvoir être entourés de leur proches, séparés de leurs aînés qui vieillissent seuls.

Les dégâts pour chacun sont lourds de conséquences :fragilités financières (multiples traversées outre Atlantique, double
loyer ), exaspération, dépression, démissions, et parfois suicide.
Car oui à plus de 6000km nous ne pouvons être proche de notre famille, passons les fêtes de fin de l’année seuls, alors que les collègues prennent un train pour rejoindre leur famille en régions.
Des familles sont séparées sans garantie d’être un jour réunis . Des enfants privés de l’un de leurs parents .

Certains renoncent à fonder une famille , construire des projets
compte tenu du déracinement que nous vivons, et d’ailleurs que bon nombre de nos parents ont vécu via le programme du « Bureau pour le développement des migrations dans les départements d’outre-mer vers la métropole » (BUMIDOM).
Alors donc, il s’agit véritablement d’un cri de détresse pour faire respecter le droit de travailler au pays, de pouvoir contribuer à la construction de la jeunesse martiniquaise qui est notre avenir. D’autant plus qu’il existe des besoins réels qui nous permettrait de rentrer. Mais chaque année c’est le jeu du chat et de la souris. Le
Ministère déclare que l’Académie de Martinique n’a pas de besoin et l’Académie de Martinique de son côté évoque que c’est le ministère qui prend la décision finale .

Voilà ici quelques témoignages concrets de ce nous vivons :
• Amanda et Franck sont tous deux professeurs de mathématiques. Ils ont été mutés en 2012 dans l’Académie de Versailles. Après 10 ans d’enseignement en collège, Franck est muté en Martinique cette année . Amanda n’a pas obtenu de mutation. Ils ont 3 enfants dont un bébé de 1 an.

• Lyvia est professeur de mathématiques et enseigne depuis 2012 en Seine-Saint-Denis en collège . Depuis 10 ans, chaque année elle demande à pouvoir rentrer en Martinique. C’est un refus systématique. Elle a 2 petites filles de 6 et 9 ans.

• Christelle, professeur de SES est dans un état dépressif depuis un 1 an mais n’obtient pas de mutation malgré une carence d’enseignants titulaires dans sa discipline.

• Florence, Céline et Jean-Yves sont professeurs de Lettres-Anglais qui ont été mutés à Amiens Versailles et en Guyane. Ils demandent en vain depuis plus de 4 ans à pouvoir être affectés en Martinique. Ils vivent tous 3 séparés géographiquement de leurs compagnons respectifs.

• Magalie, enseigne le portugais et a été contractuelle pendant 13 ans. Dans sa matière sur 9 enseignants seuls 3 sont titulaires. Pourtant elle est mutée en Île-de-France.

• Je termine par Vanessa. En 2018 son compagnon professeur de structures métalliques est muté en Martinique et elle à Paris. Leurs enfants sont alors âgés de 3 et 6 ans. 4 années plus tard ils vivent encore séparés de 6800 km pour pouvoir effectuer leurs services d’enseignement respectifs. C’est un drame familial.

Il ne s’agit là que de quelques témoignages mais la liste des titulaires mutés de force et privés de ce droit d’un retour au pays natal est encore longue.
Nous remercions le soutien des syndicats , de la population et l’initiative des députés mais la bataille est loin d’être gagnée pour que nous puissions rentrer chez nous et ne pas tomber dans l’oubli.

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